Plaidoyer pour le droit de choisir

Publié le 2 Mai 2007

Attention, je sors de ma léthargie, tous aux abris !!!

Comme cela est déjà arrivé plusieurs fois, c'est une polémique lancée sur la liste amyotrophie spinale qui me fait écrire aujourd'hui.

Une maman de la liste dit qu'elle est enceinte d'un autre enfant (après avoir eu une petite fille malade). D'autres participants lui demandent quelle technique elle a choisie pour tester l'enfant à venir, DPN (diagnostic pré natal) ou DPI (diagnostic pré implantatoire). Elle explique qu'elle n'a pas fait de test et n'en fera pas, qu'elle respecte les autres choix, mais que son mari et elle ont choisi de prendre la vie de cet enfant comme elle viendra (avec d'autres mots et j'espère que je ne trahis pas sa pensée en formulant ça comme ça).

Les réactions ont été tellement vives, et pour certaines tellement blessantes que cette maman, après avoir essayé plusieurs fois de justifier son point de vue, s'est désinscrite de la liste, pour pouvoir poursuivre cette grossesse dans une atmosphère plus sereine.

J'ai déjà donné mon opinion sur le sujet sur la liste, mais sans parler de mon expérience personnelle, ce que j'aimerais développer ici. C'est une sorte de suite de mon article "Le meilleur des mondes".

Lorsque nous avons eu le projet de faire un enfant avec mon second mari, nous avons procédé à des tests génétiques, sachant que si ces tests l'avaient montré porteur comme moi pour l'amyotrophie spinale, nous nous serions orientés vers le DPI et/ou l'adoption, mais pas vers un DPN.

Ces tests ayant montré qu'il n'était pas porteur de la délétion, nous nous sommes lancés dans la FIV (fécondation in vitro), avec succès puisque je me suis retrouvée enceinte des jumeaux assez rapidement.

Au début de ma grossesse, pendant une visite médicale, une infirmière m'a annoncé qu'en raison de mon grand âge (j'avais 36 ans), je faisais partie d'une population à risque et qu'on pouvait donc pratiquer une amniocentèse pour dépister la trisomie 21. J'ai refusé. Et à mon refus elle a répondu par un discours extrêmement agressif et culpabilisant. D'après elle, j'étais une irresponsable de ne pas vouloir de cette amniocentèse.

J'ai essayé de lui expliquer que je ne voyais pas l'intérêt de prendre le risque de faire une fausse couche alors que de toute façon je ne ferais rien du résultat, même s'il était positif. Je gardais mes bébés quoi qu'il en soit ! Elle trouvait ma position inacceptable.

Il s'est avéré depuis qu'en fait l'amniocentèse de dépistage pour la trisomie 21 n'a aucune fiabilité en cas de grossesse gemellaire (jumeaux). Et, si vous vous posez la question, cet examen n'aurait rien montré non plus pour l'amyotrophie spinale, puisque Jade et Timothée sont hétérozygotes, c'est à dire qu'ils ont hérité d'une délétion de mon côté, et d'une mutation du côté de leur père. Un examen, s'il avait été pratiqué, les aurait montrés porteurs pour la maladie (comme moi), mais pas malades.

Les solutions que nous avions envisagées pour éviter que l'histoire d'Amandine se reproduise excluaient l'interruption médicale de grossesse, car je suis incapable d'envisager de faire face à un avortement.

Et je ne suis pas catholique.

Et je suis POUR le droit à l'avortement, volontaire ET thérapeutique. Je suis pour que ce droit reste ce qu'il est : un droit, c'est à dire un choix, de parent(s). Je n'accepte pas que cela soit une obligation.

Pour en revenir à la notion d'irresponsabilité, où commence et où s'arrête cette irresponsabilité ? N'est-ce pas irresponsable de mettre un enfant, malade ou pas, au monde dans cet univers ?

Mettre un enfant au monde, c'est risquer qu'il soit atteint de n'importe quelle maladie, de n'importe quelle tare, de n'importe quel traumatisme ultérieur à sa naissance. Tous les handicaps existent, à n'importe quel stade : moteur, mental, sensoriel, mais aussi affectif, social, etc... Et pour éviter qu'un enfant en soit atteint, la seule solution est de ne pas faire d'enfant.

Mettre un enfant au monde, c'est risquer sa vie prématurément (et la perdre de toute façon, au bout de son chemin). C'est aussi, dans une certaine mesure, risquer la vie de tous ceux que cet enfant croisera sur sa route. Il pourra au mieux briser des coeurs, au pire être un chauffard d'un soir.... Il n'y a aucun garantie.

Mettre un enfant au monde est un acte irresponsable, fondamentalement. C'est un pari sur l'avenir. C'est un acte d'amour.

Macha.

PS : en parlant de "meilleur des mondes", mais cette fois avec une orientation résolument politique, je suis tombée incidemment sur la revue du même nom d'André Glucksman. Je vous recommande la lecture de l'éditorial n°3 de Printemps 2007. Saine réflexion sur la tolérance (s'il vous plaît, dépassez les deux premiers paragraphes !!!!).

Rédigé par Macha

Publié dans #Dans quel monde vivons-nous

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
L
Notre 1er enfant est né grâce à la FIV ..... un grand bonheur .... à 33 ans l'amnio ne m'a pas été proposé et je n'y pensait pas ..... Ayant mis 10 ans a obtenir cette grossesse et pour d'autres raisons sans doute très profondes, je n'aurai pas voulu être confronté au choix de l'avortement et c'est un droit que je rendique fermement pour toutes les femmes du monde!  Lors de ma seconde grossesse .... nous avons découvert que notre aîné était authiste .... devant les risques d'accouchement prématuré encourus il était hors de question de pratiquer l'amnio, y compris pour la 3ème grossesse!  Je n'avais pas de craintes, je voulais surtout poursuivre ces grossesses!Mes enfants grandissent et mon fils aîné fait de gros progrès, ce qui avait été nié par un très grand nombre de professionnels .....  Cela dit, il m'arrive parfois de penser, comme au premier jour de mon 1er accouchement, que c'est une immense responsabilité de mettre un enfant un monde, que finalement c'est "écrasant" d'amour, d'inquiétude, de frustration pour eux durant toute la période de leur éducation et que l'on se sent souvent très injustes et très durs!  Je ne regrette qu'une chose ............. ne pas avoir choisi de faire un autre enfant, pour cause d'âge trop avancé ......
Répondre
M
Chacun et chacune doit pouvoir avoir le choix et la possibilité de prendre le temps de la reflexion sur ce sujet avec une aide ou pas d'un psy pour faire un peu le point !<br /> pour ma part ! je pense que l'avortement est une douleur terrible moralement et franchement je ne souhaite cela à personne ! prendre ce choix, c'est aussi courageux que prendre l'autre choix !<br /> macha ! tu est une merveille ! et des bidous des amours
Répondre
S
Bonjour Macha, Pas facile d'écrire sur un sujet aussi délicat et de ne pas heurter la sensibilité des personnes, alors merci pour cet article très clair, je suis d'accord avec ce que tu as écrit.  <br /> Oui c'est un acte d'amour que de mettre au monde un enfant. Et ces mille actes d'amour, l'amour d'une maman, que tu accomplis au quotidien auprès de Jade et Timothée me touchent profondément. Qui ne craquerait devant ces adorables enfants, qui ne serait ému par cette belle leçon d'amour que tous les trois vous nous donnez. Amitiés. Steph
Répondre
A
Salut,<br /> <br /> Amélie a parfaitement résumée "l'autre choix" , je ne crois pas qu'il y ai eu une réelle agressivité, en tout cas je ne l'ai pas ressentie. Il est difficile de qualifier d'agressif une opinion différente même si certains mails sont effectivement partis un peu rapidement.<br /> <br /> Amandine
Répondre
A
Et bien moi, je ne suis pas d'accord. Mettre au monde un enfant est un acte irresponsable certes. Pourvoir décider ou non d'un avortement, volontaire ou thérapeutique, doir rester un choix.<br /> Par contre, mettre au monde un enfant malade (je veux dire gravement malade, avec un handicap lourd comme celui de tes bidous) alors que l"on pourrait l'éviter me parait irresponsable. Non pas que l'on puisse regretter la venue au monde de certains enfants. Mais condamner des enfants à une vie de souffrance me semble encore plus irresponsable. J'estime que dans ce cas, choisir de garder l'enfant est au contraire un acte fondamentalement égoiste qui ne prend pas en compte l'intérêt de l'enfant. C'est vouloir un enfant pour soi-même et pas pour l'enfant en lui-même. Aimer un enfant, c'est vouloir pour lui une vie la plus belle possible, pas le comdamner à errer de traitement en hopital, en kiné ou autres. Un des plus beau geste d'amour dans ce cas-là serait pour moi de renoncer à cet enfant au nom de l'amour que l'on a pour lui, d'accepter de porter la souffrance de cet avortement mais de pouvoir se dire que l'enfant n'aura pas à souffrir physiquement ou moralement de sa maladie.<br /> Un enfant gravement malade, c'est l'enfant qui souffre, les parents qui souffrent. mais au-delà, c'est tout le cercle familial ou/et amical aussi qui souffre. c'est une prise de conscience que non malheureusement cela n'arrive pas qu'aux autres. <br /> Toutes ces données (et bien d'autres encore) sont à prendre en compte lorsqu'un tel choix est nécessaire. Mais pour ma part, je reste convaincue que lorsqu'on peut éviter un vie de souffrance et de douleurs à un enfant que l'on aime, quand bien même cela serait une épreuve pour les parents, est la solution. Bien sûr, cet avis n'engage que moi et je respecte les personnes ayant une opinion différente. La tolérance doit fonctionner dans les 2 sens. Les deux opinions se défendent. Aucune n'est LA solution miracle et chacun doit faire son choix en son âme et conscience.<br /> Un bisous aux enfants. Bonne soirée quand même à tous.
Répondre